À l’heure actuelle, le pétrole continue à flamber, on est à 6,60% de hausse. D’autre part, le blé repart à la hausse et prend quasiment 8% qui, pour rappel, vient de chuter. On a également le soja qui progresse et l’or qui est en train de se consolider.
La volatilité folle du pétrole
Dans l’histoire de la finance et des marchés boursiers, il n’y a jamais eu une volatilité aussi importante. En effet, le pétrole est passé de 98 au plus haut à 138, c’est-à-dire une progression de 40%. Il a ensuite perdu 30% en quelques jours et depuis les plus bas, notamment depuis les 3 jours, il est en train de gagner 19%.
Pourquoi le pétrole continue à monter ?
L’incertitude
Sur un plan fondamental, il y a une tension d’incertitude alors que les marchés détestent l’incertitude. Quand il y a un conflit qui peut dégénérer, des missiles, un risque nucléaire, ça pousse les gens à se dire peut-être que la situation va s’aggraver et donc les prix du pétrole peuvent effectivement continuer de monter.
La demande reste marquée
L’Europe n’a pas réalisé ou n’a pas réussi à trouver des alternatives. Il est clair que même si le conflit actuel peut provoquer une récession au niveau de l’économie mondiale, il n’en reste pas moins que la demande reste plus importante que l’offre. Quand la demande est importante, les prix montent : c’est ce qu’on appelle l’économie basique.
La dimension géopolitique
Aujourd’hui, on a l’impression qu’il y a une redistribution des cartes. Les Etats-Unis ont toujours été l’allié de l’Arabie Saoudite pendant de nombreuses années. Or, il semblerait que l’Arabie Saoudite est de plus en plus en froid avec les Etats-Unis.
Pour l’Arabie Saoudite, le fait que le pétrole monte est extrêmement positif, la boîte Saudi Aramco a d’ailleurs réalisé des profits records. Cette hausse est bénéfique pour l’Arabie Saoudite car elle sait que le pétrole est limité dans le temps et qu’à un certain moment, il faudra trouver des alternatives.
Aujourd’hui, elle est en position de force et clairement tous les pays exportateurs de pétrole vont quasiment profiter de cette aubaine parce qu’ils savent également que cette situation risque de ne pas durer.
En 2008, le pétrole a explosé à la hausse et passe de 53 à 147, donc a pris 173%. Ce même pétrole en 6 mois passe de 147 à 36 donc a perdu 75% de sa valeur. C’est un fait réel dans l’économie : mes intérêts passent avant tes intérêts, comme les Etats-Unis, l’Europe et la Chine vont le faire. C’est avant tout une situation où chacun va essayer de préserver ses intérêts et là en l’occurrence l’Arabie Saoudite a intérêt à ce que le pétrole reste haut.
On est donc dans une situation où les intérêts de l’Arabie Saoudite ne sont pas ceux des Etats-Unis ni ceux de l’Europe.
Les attaques récentes des Houthis sur les sites de Aramco en utilisant des drones
Les rebelles houthi au Yémen ont attaqué au moins 6 sites à travers l’Arabie Saoudite ce week-end, tard samedi et tôt le dimanche dont certains dirigés par le géant pétrolier d’État Saudi Aramco. Nous sommes donc rentrés dans une configuration invraisemblable.
Une dimension spéculative
Quand les marchés montent, les traders ont tendance à vouloir acheter les marchés parce qu’il y a :
- Le comportement moutonnier : j’achète parce que tout le monde achète.
- La finance comportementale
- Le biais momentum
- La théorie des conventions
Qu’est ce qui pourrait faire baisser le pétrole ?
Un phénomène de panique généralisée au niveau mondial
En 2008 durant la crise des subprimes, le pétrole a continué de monter alors qu’il y avait une crise mondiale, c’était de la spéculation. Le pétrole a effectivement explosé à la hausse. Dans un deuxième temps, on a eu un effondrement qui a démarré en juin 2008. Depuis, le pétrole continue de monter parce qu’à l’époque, il y avait des pays émergents et la demande était importante. Cela a donc poussé le prix du pétrole à la hausse parce que la demande était supérieure à l’offre et on avait cette composante spéculative.
Ensuite, on s’est retrouvé dans une situation où tout le monde a commencé à vendre, notamment un phénomène de panique parce que le pétrole a perdu 75% en seulement 6 mois.
Ralentissement de la croissance économique
Si la croissance diminue, la demande va diminuer, l’offre va augmenter, surtout si on rétablit la relation avec l’Iran, le Venezuela, etc. Les prix du pétrole continuent à monter mais est-ce qu’on risque d’avoir un effondrement ? L’histoire ne se répète jamais de la même manière mais 2008 est une période idéale pour une étude de cas, elle nous donne des clés.
L’un des grands gagnants de ce conflit, c’est l’Arabie Saoudite
Saudi Aramco, une compagnie saoudienne qui appartient à l’Etat saoudien, vient d’ailleurs d’enregistrer des résultats records. Elle a réalisé 110 milliards de dollars de profits en 2021 contre 49 milliards de dollars en 2020, soit une hausse de 124% grâce à la hausse du pétrole. En 2022, si cette situation continue, Aramco va encore gagner énormément d’argent.
Si le pétrole monte, c’est parce que derrière, il y a une situation inédite, il y a un cartel, c’est-à-dire des pays qui sont alliés pour tenir les prix ou du moins pour les maîtriser. Il faudrait donc un contre-pouvoir, c’est là où :
- Macron parle du fait d’acheter du pétrole au niveau européen
- Biden a commencé à taper du poing
Les Etats-Unis, la Chine et l’Europe ont le pouvoir de baisser les prix. Ils ont les moyens, ils ont la capacité de le faire mais la réalisation va être compliquée parce qu’ils ne voudront pas nécessairement se mettre d’accord. En effet, chacun va jouer ses intérêts. Or, s’ils se coordonnent, ils peuvent clairement faire baisser les prix.
Les conséquences de la hausse des prix du pétrole
L’inflation mondiale
Le pétrole pourrait provoquer une inflation mondiale qui ressemblerait à celle des années 70 et c’est ça qui est très grave parce qu’aujourd’hui, on est réellement dans une situation inédite.
La hausse des prix des matières premières
On a les prix des matières premières agricoles à savoir le blé, le soja, etc qui seront également touchés par cette hausse. En effet, pour produire du blé, il faut utiliser du pétrole pour les tracteurs et le transport.
L’Ukraine et la Russie assurent 25% de la production de blé mondiale. Or, ils baissent leurs exportations. Des exportations qui sont fortement réduites, plus le pétrole qui flambe, ça va avoir un impact sur le coût de production du blé et donc provoquer une hausse de ses prix.
Étant important pour une grande partie de la population mondiale, cela peut provoquer de la famine, des émeutes, notamment le même phénomène en 2008. Ce dernier correspond à la sortie des gens parce que c’est trop cher. Malheureusement, beaucoup d’innocents vont probablement perdre leur vie. Bref, on est actuellement en train d’assister à une autodestruction.
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